dimanche 7 mars 2010

3 - Ces malentendus qui nous déchirent...

POV Edward :

Putain… c’est pas possible… ça fait un mal de chien, bordel !
J’ai encore dû m’en prendre une sévère hier soir pour avoir une casquette plombée comme celle que je me traîne… Je me retournais en grognant dans mon lit. Mais qu’est-ce que c’est que ça ?
Une tête blonde sortait des couvertures… Un corps de femme… nu…

Putain mais qu’est-ce que j’ai foutu ? C’est qui celle-là ? Et qu’est-ce qu’il s’est passé ?
Et merde ! Qu’est-ce que je fous à poil ? Dans quelle galère je me suis encore fourré, une fois de plus ?

La fille dormait toujours et je n’avais pas vraiment envie d’être encore au lit lorsqu’elle se réveillerait… Courageux, mais pas téméraire. Qu’est-ce que j’allais bien pouvoir lui dire ?
Je me levais en faisant le moins de gestes brusques et de bruits possibles, d’une part pour la laisser dormir, mais surtout à cause de la gueule de bois que je me cognais et qui se rappelait à mon bon souvenir au moindre mouvement J’enfilais rapidement les fringues qui étaient éparpillées au sol et passais à la salle de bains me rafraîchir un peu.

Bon sang, dans quoi j’me suis fourré ?
Ouais ben, fallait pas picoler comme un trou ! Après tu t’étonnes d’avoir un black-out? Non mais sérieux, t’as vu ce que tu t’enfiles depuis 4 mois ?
Pas la peine de me faire la leçon, je sais… j’assume.
Ah ouais ? Et quand ? Entre deux cuites ?
Fais pas chier, j’assume j’te dis !

J’allais dans la cuisine et me fis couler un expresso avant de laisser fondre un gramme de paracétamol dans un verre d’eau. Beurk ! C’est vraiment dégueulasse ce truc…
Je m’envoyais mon café et un petit Jack lorsque la fille me rejoignit.

- Salut Edward ! Bien dormi ?

- Humm… Ouais. Euh... Salut.

Dans ma misère, j’avais quand même eu de la chance, la fille était plutôt pas mal. Grande, blonde, un corps élancé et athlétique, un beau visage, des yeux noisette pétillants de malice…
Mon cœur se tordit de douleur lorsque je vis à quel point les yeux de la fille ressemblaient à ceux de ma Bella. Ah Bella… une seule nuit… et elle me hante toujours depuis 4 mois…
La fille se dirigea vers la machine à café, attrapa une tasse, prépara sa dose de kawa et le fit couler puis vint s’asseoir juste en face de moi. Ses yeux étaient amusés et elle se mordait la lèvre pour ne pas rire, puis son regard se posa sur la bouteille de JD qui était dans ma main. Ses lèvres se pincèrent en une fine ligne et son regard se fit terriblement sévère.

- Putain mais tu crains vraiment toi ! Bordel Edward, il est même pas 10 heures et tu carbures déjà au bourbon ? T’es malade !

- Putain, mais t’es qui pour me faire la morale, hein ? Qui ?

Un soupçon de tristesse voila son regard mi-rieur, mi-coléreux puis elle secoua la tête d’un air affligé avant d’éclater d’un rire franc.

- Tu te rappelles de rien, pas vrai hein ? Bah, vu la couche que tu tenais hier soir, ça m’étonne pas !

Un petit sourire moqueur aux lèvres et le regard amusé, la fille me tendit la main. J’hésitais légèrement avant de la prendre et de la lui serrer puis de la relâcher, putain qu’est-ce que je pouvais avoir l’air con !

- Salut Edward ! Alors moi, c’est Kate !

- Euh… Enchanté Kate ?

Putain, j’en pouvais plus. LA honte. Bon, au moins maintenant, je connaissais son prénom, mais ça ne me disait vraiment pas ce qu’il s’était passé la veille…

- Tu te rappelles vraiment rien de rien ?

Embarrassé au plus haut point, je baissai la tête en essayant de penser à ce que j’avais fait la veille. Qu’est-ce que j’avais bien pu branler dans la soirée ? Et le regard rieur de Kate n’arrangeait rien, elle s’amusait énormément de la situation.

- Pfff… Non. Euh… j’avoue, je… je ne sais pas ce que j’ai foutu hier soir, j’me rappelle plus… Sauf avoir passé la soirée au « Twilight » et me réveiller avec une gueule de bois carabinée.

Kate, les bras croisés sur la poitrine, eut un sourire légèrement pincé lorsqu’elle me répondit.

- Franchement tu me vexes, Edward. Mais bon, là j’ai plus envie de me foutre de toi, tu me fais rire !

- Euh… Est-ce que… y’a eu… euh… on a… enfin… tu vois, quoi.

Je n’osais même pas lui demander si nous avions couché ensemble tellement la honte me submergeait, me laissant à court de mots.

- Si tu veux savoir si on a baisé, la réponse est non.

Sans m’en rendre compte, j’avais retenu mon souffle en attendant sa réponse et je poussais un long soupir de soulagement. Ouf ! Je n’avais pas trompé mon ange… enfin… pas vraiment… puisque nous ne sommes pas vraiment un couple, voir pas du tout même. Puis je me rappelais de nous deux nus dans le lit…

- Euh… Qu’est-ce qu’on foutait à poil, alors ?

Kate me lança un regard affligé, ses yeux si semblables à ceux de Bella pétillant d’amusement, puis elle éclata d’un rire railleur et sonore.

- Ah ! Ah ! Ah ! Aaaah… mystères, Ed ! EH ! Pas la peine de t’affoler, je blague ! Pour faire court, tu m’as draguée hier soir dans un bar, tu n’y es pas allé par 4 chemins, d’ailleurs, tu m’as chopée par le poignet et roulé une pelle direct ! J’avais envie de baiser, tu m’as amenée ici, on a commencé à s’enflammer, on s’est déshabillé, allongé, embrassé, peloté et puis t’as commencé à m’appeler « Bella »… Mon amour-propre en a pris un sacré coup, je dois dire ! Et avant même d’avoir le temps de t’envoyer bouler loin de moi, tu ronflais déjà ! Et vu que j’en avais un petit coup dans le béret, je suis restée pour pioncer. Tu m’en veux pas, j’espère ?

- Hein ! Euh… non. Non, je ne peux pas t’en vouloir. Je devrais plutôt m’excuser…

- T’excuser de quoi ? De m’avoir draguée, allumée à mort ou appelée par le prénom d’une autre ?

- Euh… Ouais, c’est… tout ça, en fait. J-Je suis désolé, je me suis conduis comme un con… je ne sais pas ce qu’il m’a pris… je suis plutôt du genre réservé avec les filles… Les coups d’un soir… c’est pas mon truc.

Je me renfermai subitement en repensant au seul « coup d’un soir » de ma vie, Bella… Un vrai coup de foudre. Une seule nuit avec elle et mes pensées étaient hantées par son souvenir en permanence. Je la voulais au point où ça en devenait nocif pour ma propre santé mentale. Il avait suffi d’une dose, et une seule, pour que je sois en manque et le sevrage était infernal et surtout sans fin. J’étais complètement obsédé par elle à un point que je préférai revivre mon trip et me complaire dans mes fantasmes, l’alcool et la musique aidant. C’était tellement mieux que la réalité, devenue si compliquée à affronter…
Je fus brusquement tiré de mes pensées par de violentes secousses et la voix lointaine de Kate.

- Ard… Edward… houhou t’es là ?

- Hein ? Quoi ? Euh… Désolé Kate je…

- Te bile pas ! Par contre, tu as attisé ma curiosité… C’est qui cette Bella ?

- J… Personne. C’est personne…

- Edward, je suis peut-être blonde, mais je ne suis pas totalement conne non plus. Ne me dis pas que cette Bella n’est « personne » pour toi, je ne le crois pas. Il n’y a qu’à voir ta tête maintenant pour comprendre que tu souffres, et pour moi, 1 + 1 ça fait 2. Les deux sont liés. Qu’est-ce qu’il t’est arrivé, Edward ? C’est qui Bella ?

Je croisais le regard surpris et curieux de Kate. Ce n’était pas de la curiosité mal placée, avide de commérages et du malheur des autres, loin de là ! Elle était simplement intéressée, vraiment intéressée par les évènements. Elle avait l’air concernée par ce que je vivais. Son visage reflétait la compassion et ce fut là, sans savoir ni pourquoi, ni comment, simplement en plongeant dans ses yeux noisette, que je perdis pied et lui racontais tout. Je déballais toute l’histoire de ma vie à une nana parfaitement inconnue au bataillon.
D’abord ma vie d’avant elle et mes multiples déboires sentimentaux, notre étrange rencontre passionnée et que depuis 4 mois, j’étais tombé dans la déchéance la plus totale après avoir passé une nuit idyllique avec une parfaite inconnue… Que nous nous étions « séparés » sur un malentendu… Qu’ensuite, pendant 3 mois, j’avais su gérer un minimum… très petit minimum grâce à mon boulot, mais que j’avais pris un congé sabbatique parce que je n’étais plus capable d’assumer au taf… Que je ne faisais que penser à elle depuis cette nuit-là, qu’elle m’obsédait… Que j’avais continué d’espérer après l’avoir vue dans les bras d’un autre… Que j’avais dû me faire une raison après l’avoir attendue des heures après mon dernier concert pour rien, elle n’était jamais venue… Que bien qu’elle se soit trouvée quelqu’un d’autre, elle occupait mes pensées 24 heures sur 24… Que j’étais désespérément fou amoureux en fin de compte, mais cela je le gardais pour moi.

- Ben dis-donc, t’es sérieusement atteint, là ! Mais dis-moi, je comprends pas… Pourquoi avoir attendu hier soir pour tenter de passer à autre chose ? Pas que ça ait marché, hein, loin de là ! T’es encore trop mordu pour ça… Mais pourquoi hier ?

- Euh… Je comprends pas Kate… Qu’est-ce que tu veux dire par là ?

- Ben, c’est évident ! Voyons, Ed ! Tu me dis que depuis 4 mois, tu ne fais que picoler et penser à elle, et « boum » ! D’un seul coup, ça te prend « tiens, ce soir je vais tirer un coup pour passer à autre chose » ! Qu’est-ce qu’il s’est passé pour ça ?

Effectivement, ce n’était pas bête… Pas une seule fois depuis notre rencontre je n’avais pensé à aller « voir ailleurs », l’idée ne m’avait même pas effleurée. Même si Bella n’était pas ma compagne, j’avais l’impression de la tromper… Que s’était-il passé pour que je drague une parfaite inconnue ? Kate avait été très claire, là dessus, c’est moi qui étais allé vers elle. Enfin, « jeté sur elle » serait plus approprié…
J’essayais de me remémorer les évènements de la veille. C’était loin d’être évident, vu mon mal de crâne et mon absence totale de souvenirs concernant la soirée. Je pataugeais dans un épais brouillard à la recherche de ce que j’avais fait… Emmett et Rosalie m’avaient emmené au bar… Tiens, en parlant de mon frère, il n’est pas là, c’est bizarre… On a discuté avec Jazz et Alice… J’ai fait du piano… J’ai bu, mais ça c’est plus vraiment une surprise. Et j… Bella.

- J’ai vu Bella.

- Quoi ? Mais t’es vraiment le roi des cons, ma parole ! Tu vois la nana qui t’obsède au point que tu te laisses complètement aller… Pas la peine de prendre ton air outré, Edward, je m’excuse de le dire comme ça, mais c’est vrai, t’es une loque… Donc, je disais… Tu vois ton fantasme et puis tu trouves rien de mieux que lever une parfaite inconnue devant elle ? Si tu voulais ruiner toutes tes chances, alors là tu peux être sûr d’avoir réussi, bravo !

Le regard indigné de Kate me transperçait tandis qu’elle me récitait son petit laïus. Une fois qu’elle eut fini, elle secoua la tête avec emphase en claquant sa langue contre son palais.
J’enfouis mon visage dans mes mains et tentais de peigner mes cheveux avec mes doigts tout en réfléchissant à ses paroles. Effectivement, j’avais fait une sacrée boulette… dans le genre connerie de première, c’était réussi ! Mais de toute façon, il fallait bien que je me rende à l’évidence un jour, Bella ne sera jamais à moi… Si j’avais eu de gros doutes à ce sujet, j’en avais eu la preuve hier soir…

Quand vont-ils enfin me foutre la paix ? Ils ne se rendent donc pas compte qu’à force de me parler d’elle, je m’enfonce ? Si au moins, de temps à autre, ils me laissaient seul, mais non… Même la solitude je n’y ai plus le droit ! Il faut toujours qu’il y en ait un avec moi. Ils croient quoi, que je vais me foutre en l’air ? Ben non, même pas… Même ça je n’en ai pas envie ! Je n’ai envie de rien de toute façon… Enfin presque… j’ai uniquement envie d’elle. Avec Emmett et Rosalie, nous sommes arrivés au bar, et comme à mon habitude, j’attrape une bouteille, du rhum si j’en crois l’étiquette et file me mettre au piano. Je suis dans mon refuge…
Je confirme, c’est bien du rhum.
Je pose mes mains sur le clavier et ferme les yeux, imaginant les sensuelles courbes de Bella à la place de l’ivoire, et les caresse doucement. Mes fantasmes se métamorphosent sous mes doigts, devenant mélodies et je m’évade grâce aux notes dans mon idéal... Je vais la chercher à la sortie de l’opéra, une fois sa répétition terminée, elle se jette dans mes bras… Nous rentrons chez nous et je la plaque contre la porte à peine rentré… Elle est si belle quand elle est au summum du plaisir… L’aube naissante nimbe son corps épuisé par nos ébats d’une pâle lumière dorée et illumine son beau visage… Elle est si belle avec sa bague de fiançailles pour seul vêtement, la main posée sur son ventre arrondi par notre enfant… Dans quelques jours elle sera mienne, enfin… Bella…
Putain ! Faut que j’arrête ça au plus vite, je me fais plus de mal que de bien…
L’une de mes mains quitte le clavier pour attraper la bouteille posée à côté de moi sur le banc. J’avale quelques goulées et je sens qu’on m’observe. Je sais que mon frangin et nos amis ont le regard fixé sur moi, j’imagine déjà la pitié, la compassion et la sollicitude qui dégoulinent de leurs yeux. Il y a autre chose… J’ai l’impression qu’une boule de douce chaleur se forme dans mon ventre puis que des milliers de papillons y virevoltent, je me sens étrangement bien et flotte dans du coton. Exactement 4 mois que je n’ai pas ressenti ça. J’ouvre les yeux et tourne la tête à droite, je ne sais pas pourquoi, mais il le faut. Mon regard tombe directement sur Bella…
Elle est assise à une table tout au fond de la salle, Emmett et Rosalie avec elle. Alors que mon frère et ma future belle-sœur s’escriment à lui faire la conversation, Bella n’y prête pas attention, elle n’a d’yeux que pour moi...
Une immense tristesse voile son beau regard, son visage si doux en temps normal a les traits tirés par la fatigue et d’immenses cernes creusent ses pommettes, mais lorsque ses magnifiques prunelles chocolat s’ancrent aux miennes, elles se mettent à brûler d’un feu sacré, flamboyant de passion et enflammé par le désir. Mon cœur mort se réchauffe instantanément et j’ai envie d’y croire. Je sens mes mains trembler et continue à jouer le temps de me calmer. J’aurai l’air de quoi si je me mettais à bafouiller et avoir la tremblote devant elle ?
En l’observant attentivement, je la trouve changée. Ses cheveux ont terni, ils ont perdu leur éclat si chatoyant, mais elle a surtout perdu du poids, facilement 5 kilos… Je suis sûr que son boulot doit l’user comme c’est pas permis. Elle porte un vieux jeans délavé, râpé au niveau des genoux, et un sweat bien trop ample pour sa fine silhouette. Bien que ça ne la mette pas du tout en valeur, Bella est splendide car même un sac poubelle n’altèrerait pas sa beauté naturelle.
Un sourire timide étire ses lèvres et même de loin, je vois ses yeux briller. Elle a l’air excitée par notre rencontre et pose une main sur son ventre, un sourire radieux aux lèvres. C’est le moment… Enfin !
Maintenant…
Au moment où je plaque le dernier accord, pressé de la rejoindre, je vois Jacob s’avancer à leur table, elle lui fait un sourire éblouissant… . Il lui chuchote quelques mots à l’oreille et je la vois mettre ses deux mains devant la bouche, les yeux grands ouverts par la surprise. Elle se lève brutalement et se jette dans ses bras en criant « oui, Jacob ! Bien sûr que je te dis oui ! ».
L’atterrissage est plus que violent et je suis sûr que toute couleur a dû me quitter. Mais quel abruti je fais d’y avoir cru à ce point ! Je me lève avec une seule idée en tête, me barrer d’ici…
Sans le faire exprès, je bouscule une blonde qui n’est pas très loin de leur table, et sans savoir pourquoi, je l’agrippe par le poignet et l’embrasse à pleine bouche avant de l’emmener chez moi sous les regards stupéfaits de mon frère et Rosalie, sidérés de Jazz et Alice, assassin de Jacob et celui douloureux de Bella...

Bella…
Mais qu’est-ce que j’ai pu être con de croire qu’il pouvait y avoir quelque chose entre nous !
Solidarité féminine oblige, Kate était en colère que j’eusse agi de cette façon envers Bella. Si elle savait… Je n’arrêtais pas de recevoir tout un tas de jolis noms d’oiseaux, allant de « crétin » à « abruti » en pensant par « atrophié du bulbe » ou « résidus de con ». Je sentis quelque chose tirer sur ma main, et en baissant le regard, je vis que Kate s’escrimait à me prendre mon JD.

- Putain, fous-moi la paix, Kate ! Lâche ça bordel !

- Ta gueule, Edward ! Tu m’parles pas comme ça, ok ? Tout ce que je veux, c’est essayer de t’aider ! Alors si tu veux réparer les pots cassés avec ta Bella, arrête déjà de picoler dès le matin ! Si t’avais pas été aussi bourré hier, c’est avec elle que tu te serais réveillé au milieu de tes draps et non avec moi !

Malgré moi, les larmes se mirent à couler. Putain ! Voilà que maintenant je me mettais à chialer comme une gonzesse, devant une gonzesse en plus ! Pathétique…
Et pourtant, je n’arrivais pas à les stopper, la tête enfouie dans mes bras posés sur la table. J’entendis du bruit et du mouvement, puis sentit la main de Kate se poser sur mon épaule.

- Je suis désolée, Ed… J’aurai pas dû être aussi directe… T’inquiète pas, tu vas la récupérer ta chérie…

- Im…possible… Fi-fini… Terminé…

- Arrête ça tout de suite ! Si tu pars défaitiste, ça ne marchera pas ! Il suffit juste qu’on retourne au bar et on expliquera à tes potes qu’il ne s’est rien passé entre nous parce que tu ronflais trop pour ça ! Je suis sû…

- C’est très gentil de ta part de vouloir m’aider, Kate, mais ça ne servira à rien… Plus à rien… Il est trop tard…

Elle m’assena une tape sur la tête - putain c’que ça fait mal ! - puis posa ses mains sur mon visage ruisselant de larmes, me forçant à plonger mon regard dans le sien. Les yeux de Kate brûlaient d’une détermination féroce et envoyaient des éclairs. Je ne supportais pas de soutenir son regard, ne voyant que celui de Bella à la place. Bella…
- Il n’est jamais trop tard, Edward.
- Cette fois, si… Elle va se marier…

POV Bella :

Je fus brutalement réveillée par de violentes nausées. Encore une fois, je me levais trop vite et fus prise de vertiges. Et moi qui pensais que seul le premier trimestre d’une grossesse était éprouvant… Pourtant, je suivais les conseils du médecin à la lettre, enfin presque…
J’étais assise sur le bord de mon lit lorsque j’entendis la porte d’entrée s’ouvrir.

- Bells, t’es où ?

La voix de Tanya résonna dans mon crâne et déclencha automatiquement un mal de tête. J’en avais marre de ces foutus maux de crâne, nausées et vertiges en tout genre ! Et dire que j’ai encore cinq mois à tenir…
Je me levais brusquement et fonçais aux toilettes pour déverser le vide contenu dans mon estomac lorsque l’odeur du café me parvint aux narines. Je me rinçais la bouche, me passais de l’eau sur le visage et allais à la rencontre de mon amie.

- Salut Tanya !

- Salut ma puce !

Elle enroula ses bras autour de mes épaules et me claqua une bise sur la joue.

- Seigneur Bella, fais quelque chose ! Tu es toute blanche ! Tiens, je t’ai préparé un petit déjeuner ! Et pense aux bébés, mange !

Je grognais mais allais quand même m’installer sur le canapé ; Tanya m’apporta un plateau avec un thé, un jus d’orange frais, un yaourt et des biscuits. Rien que de voir l’abondance de nourriture me coupait l’appétit…
Je mangeais lentement, mâchouillant plus que nécessaire, ce qui énervait Tanya copieusement. Une fois mon déjeuner terminé, la « torture » commença. Tanya me pesa et m’engueula car je n’avais pas pris un seul kilo depuis le début de ma grossesse, au contraire, j’en avais perdu sept. Elle mesura ensuite la hauteur de mon utérus et fit un sourire satisfait lorsqu’elle vit le nombre indiqué sur son mètre de couturière.

- Bon ! Vu que tu dois aller chez le gynéco dans quelques jours, je vais t’épargner la palpation du col !

Et en plus, elle se moquait de moi. Mes hormones commençant à monter en ébullition, j’informais Tanya que j’allais à la douche histoire de me détendre. Pour la première fois depuis de très, très longues semaines, je me trouvais nue devant le miroir. Je fus frappée par l’image qu’il reflétait. Celle d’une jeune femme faible et fragile, continuellement triste, son épuisement souligné par les immenses cernes qui se trouvaient sous ses yeux, à la peau et aux cheveux ternes. Je posais une main sur mon ventre parfaitement plat. En me regardant, personne ne pourrait penser que j’étais enceinte, et encore moins de jumeaux ! J’avais perdu du poids, beaucoup même, et en peu de temps. Le gynécologue qui me suivait mettait ça sur le compte des nausées et du surmenage, alors qu’en fait, c’était plus simple que ça, j’avais perdu tout appétit, me contentant de picorer quelques miettes par-ci, par-là, depuis cette nuit et c’était pire encore depuis cette soirée…
L’eau ruisselant sur mon corps amoindri, je me remémorais cette image qui avait brisé tous mes rêves d’être avec Ed… lui.
Il l’étreignait fermement dans ses bras ; elle avait son visage enfoui dans son cou. Jessica…
Quelle idiote j’avais été de croire qu’il allait m’attendre !
D’un autre côté, je ne pouvais pas lui en vouloir… Jessica et lui avaient été fiancés pendant quelques années avant qu’elle ne le quitte. Elle s’était sûrement rendue compte de son erreur et souhaitait renouer avec lui. Qui ne le souhaiterait pas ? Et honnêtement, que vaut une nuit de passion comparée à plusieurs années de vie commune ? J’essayais de me faire une raison, qu’Ed… qu’il faisait le bon choix en se remettant avec Jessica, qu’il avait raison… et surtout qu’il m’avait oubliée… Mais une petite étincelle continuait de brûler en moi, me donnant envie d’y croire, même si j’en souffrais. Et entendre sempiternellement Rosalie, Emmett, Alice et Jasper me rabâcher à longueur de temps « mais si, il est fou de toi ! Il t’aime ! » n’arrangeait rien à mon désespoir, bien au contraire…
Depuis cette soirée là, mon moral en avait prit un sacré coup, et malheureusement ma santé aussi ; ma dernière visite chez le gynécologue me l’avait confirmé…

- Mademoiselle, je ne vais pas vous mentir, je m’inquiète pour vous. Vos résultats d’analyses me sont parvenus et ne sont pas vraiment bons. Votre taux de fer est incroyablement bas et vous risquez fort de vous retrouver anémiée d’ici peu. Je vais vous prescrire un complément en fer ainsi qu’un complément vitaminique qui boostera votre organisme. Je vais également vous mettre en arrêt de travail…

- Mais docteur, la danse est toute ma vie ! Je vais bien, je suis capable de cumuler les deux.

- Non. Vous le pensez peut-être, mais votre corps est incapable de tenir la distance. Vous avez perdu trop de poids, vous souffrez de malaises récurrents et vous avez un taux de fer qui atteint des profondeurs abyssales ! Maintenant, le choix est vôtre : le travail ou les bébés. Vous avez une trop mauvaise constitution physique actuellement pour mener de front votre carrière et votre grossesse. Dans le meilleur des cas, vous risquez un accouchement hautement prématuré et je ne plaisante pas. Vous êtes épuisée physiquement et psychologiquement, vous êtes surmenée, vous êtes excessivement affaiblie et vous attendez des jumeaux. Vous devez faire un choix, et très vite.

- J… je vais m’arrêter. Mais rassurez-moi, je vous en supplie, dites-moi que les bébés vont bien !

- Pour le moment, ils se développent tout à fait normalement.

- Qu’entendez-vous par-là, docteur ?

- Disons que pour le moment, ils vont bien. Vous avez perdu une grande quantité de poids puisque les bébés puisent dans votre organisme et que vous êtes sujette à de violentes nausées et vomissements. Par contre, vous en êtes à un stade critique, ils ne sont plus embryon, mais fœtus désormais et ont besoin de se fortifier. Vous ne devez absolument plus perdre de poids et surtout vous reposer le plus possible pour qu’ils puissent continuer à se développer correctement. Vous devez avant tout penser à vous et à eux. Une sage-femme passera une fois par semaine pour contrôler votre poids et la hauteur de votre utérus, mais aussi s’assurer que vous mangez correctement. Je ne sais pas ce qui vous préoccupe à ce point, mademoiselle, mais il faut que vous vous repreniez en main le plus rapidement possible si vous souhaitez avoir des enfants en bonne santé et mener votre grossesse à terme.

Le choix avait été rapide. Même s’il ne partageait pas mes sentiments et que notre «histoire» avait avorté avant même de pleinement commencer, j’avais la chance d’avoir une part de lui en moi… J’avais donc mis ma carrière entre parenthèses et posé un congé sabbatique d’un an, en plus de l’arrêt prescrit par le médecin. Nos bébés passaient avant tout…
Je me forçais également à manger un peu plus et bien que je n’aie toujours pas pris un gramme, je ne perdais plus de poids, ce qui était une bonne chose en fin de compte. Et surtout, je me reposais au maximum.
Je sortis de la salle de bains pour voir Tanya rayonner de bonheur. Elle avait appris qu’elle était enceinte il y a quelques jours. J’étais heureuse pour Jacob et elle, mais je ne pouvais m’empêcher de la jalouser. Alors que j’étais malade tous les jours, Tanya ne souffrait d’aucune nausée, vertige ou autres douleurs mammaires. Sa grossesse, même si elle n’en était qu’à son tout début, l’épanouissait totalement et la rendait encore plus belle, alors que mes cheveux et ma peau étaient ternes et asséchés.

- Au fait Bella, tu viens toujours manger à la maison demain soir ? Garrett sera là…

- Tanya… Oui, je viens toujours chez toi, mais arrête d’essayer de me caser avec lui s’il te plaît !

Elle leva les yeux au ciel en soufflant lourdement mais finit par accepter.
Depuis que j’avais retrouvé Jack et Tanya, il ne se passait pas une semaine sans que je n’aille dîner chez eux. Un jour, Tanya m’avait retrouvée, pleurant devant le journal télévisé. Jessica y était apparue, interviewant je ne sais plus quelle célébrité et cela m’avait immédiatement rappelé qu’Ed… il ne serait jamais à moi et surtout à nos côtés. Elle s’était donc mis en tête de me trouver quelqu’un et m’avait présenté Garrett, un pédiatre qu’elle connaissait à l’hôpital. Comme par hasard, à chaque fois que je mangeais chez eux, Garrett était là ! Et si l’idée d’entretenir une quelconque relation avec lui me répugnait au plus haut point, ce n’était pas du tout son cas puisqu’il me draguait ouvertement. Je le trouvais très sympathique, drôle, charmant, intelligent… mais Garrett n’était pas Ed… lui. Je ne pouvais pas m’imaginer dans d’autres bras que les siens, ça me donnait l’impression de lui être infidèle. Résultat, à chaque repas chez eux, Tanya et Jack insistaient lourdement sur les « qualités » de Garrett, et avant de rentrer chez moi, j’avais le droit à une leçon de morale de la part de mon amie…
Côté « leçon de morale », j’avais déjà donné ! Et j’en bavais encore ; Emmett me faisait la gueule… Il ne m’adressait plus la parole… Enfin sauf pour m’adresser des reproches…
Je lui avais promis de parler de ma grossesse à son frère le soir du concert, mais lorsque je l’avais vu dans les bras de Jessica, je m’étais retournée sans demander mon reste. Je m’étais sauvée… Ce soir-là, j’étais rentrée directement chez moi, ne souhaitant voir personne et pleurer librement toutes les larmes de mon corps. Je n’avais raconté à personne ce que j’avais vu, de toute façon, personne ne m’aurait cru tant ils étaient persuadés qu’Ed… qu’il ne pouvait pas vivre sans moi. Ah, quelle bonne blague ! Depuis, lorsque Emmett me parlait, c’était pour me dire que je rendais son frère malheureux – mon cul, ouais ! La Stanley s’en occupe bien ! – que j’étais une garce de lui cacher sa paternité, qu’il bousillait sa santé pour moi, que je le tuais à petit feu et j’en passe puisque selon Emmett, son frère sombrait dans la déchéance, et bien entendu, j’en étais l’unique responsable... Rosalie, quant à elle, essayait de tempérer tout ça… Tout en rajoutant une couche par-ci, par-là, genre « tu sais, Edward et toi feriez un si beau couple », « c’est un timide, il ne sait pas comment venir vers toi » ou encore « les jumeaux auront besoin de leur père »… Et ça me faisait si mal d’entendre ça… J’avais tellement envie d’y croire !
Je sortis de mes pensées lorsque Tanya tapota doucement sur mon épaule.

- Bella, je dois y aller. Je suis désolée, ce n’était pas prévu, mais c’est à croire que la majorité des femmes enceintes de Seattle ont décidé d’accoucher aujourd’hui ! On se retrouve au « Twilight » comme prévu ce soir ?

- Oui Tanya, compte sur moi, j’y serai ! Merci encore…

Elle m’étreignit fermement et me plaqua un baiser sonore et mouillé sur la joue avant de quitter mon appartement.
Je passais ma journée à lire et écouter de la musique, puis vers les 18 heures, la sonnette retentit. J’ouvris pour découvrir devant ma porte Emmett et Rosalie. Je leur fis signe d’entrer et comme à son habitude, depuis quelques temps, Emmett boudait. Rose me fit la bise avant de me traîner dans ma chambre.

- Eh Rose ! Tu fais quoi ?

- Bah c’te question ! Je vais t’aider à t’habiller !

- Je ne suis pas une incapable, Rosalie, je sais très bien m’habiller toute seule !

- Oui, oui, c’que tu dis…

- Rosalie, je suis très bien comme ça ! Je me sens à l’aise…

- Dans un vieux jeans pourri et un sweat informe ?

- Rosalie, j’ai besoin de me sentir à l’aise dans mes fringues. Te connaissant, tu vas vouloir me faire porter des vêtements courts et moulants. En temps normal, ça ne me gêne pas, mais n’oublie pas que je suis enceinte et malade. Alors si j’y vais, c’est avec mon vieux jeans pourri et mon sweat informe, comme tu le dis si bien !

Rose leva les yeux aux ciels en marmonnant des « cas désespéré » ou encore « ah, les hormones de femmes enceintes ». Je lui rappelais gentiment qu’un jour ou l’autre, elle aussi vivrait une grossesse et les brusques changements d’humeur…
Tout le temps que dura le trajet jusqu’à mon bar préféré, Emmett ne m’accorda ni un seul regard, ni un seul mot. J’aurais presque eu l’impression d’être totalement invisible si Rosalie ne s’escrimait pas à faire la conversation. Fréquemment, elle jetait des regards exaspérés à son compagnon tout en secouant sa si belle tête et marmottant des « mais quel gamin ! C’est d’un puéril ! ». Bien entendu, Emmett faisait comme s’il n’entendait rien et je me sentais de plus en plus mal... Nous arrivâmes finalement au « Twilight » vers 19 heures, Jazz et Alice m’étreignirent chacun leur tour. Alice, pourtant si petite qu’elle me donnait l’impression d’être un lutin monté sur ressorts, m’enlaça avec une force phénoménale.

- Je suis si contente de te revoir, Bella ! Pépia-t-elle d’une voix aiguë.

- Alice, nous nous sommes vues hier !

- Et alors, je n’ai pas le droit d’être heureuse de revoir mon amie ?

Je lui embrassais sa joue en riant de la voir m’accueillir comme si elle ne m’avait pas vue depuis un siècle. Une fois les effusions terminées, j’entendis une douce mélodie jouée au piano. En me tournant vers l’estrade pour voir qui jouait, je dus me cramponner au comptoir alors que mes jambes se dérobaient sous mon poids. Il était là…
Je me sentis vraiment mal d’un seul coup et fus prise de sueurs froides. J’avais tellement mal de le voir là… Les jambes tremblantes et le contenu de mon estomac menaçant de m’échapper d’un moment à l’autre, je m’éloignais aussi vite que je le pouvais vers la sortie. Emmett m’attrapa violemment par le bras et m’empêcha de partir.

- Lâche-moi, Emmett !

- Ah non, cette fois, tu vas aller lui parler ! Y’en a marre, Bella ! Arrête de t’esquiver !

- Et pourquoi, Emmett ? Pour souffrir encore plus que maintenant et risquer de gâcher sa vie de couple ?

- Mais qu’est-ce que c’est que cette fausse excuse ? Ed n’a personne dans sa vie !

- Bien sûr que si… Je l’ai vu… Je les ai vus…

- Mais non, j’te dis ! C’est mon frangin j’te rappelle !

Tous me regardaient comme si j’étais complètement folle. Je lisais sur leurs visages incrédules leur incompréhension et allais donc devoir leur expliquer ce dont j’avais été témoin. Il cache bien son jeu pour que son frère et ses amis ne s’aperçoivent pas de sa relation… Je leur racontais donc ce qu’il s’était passé ou plutôt ce qu’il ne s’était pas passé, après le concert. Lorsque je leur dis que je les avais trouvés dans les bras l’un de l’autre, Jessica et lui, ils soupirèrent de soulagements et rirent bruyamment. Super ! En plus, ils se foutaient de moi…

- Ah lala… J’me doutais bien qu’il y avait un gros malentendu là-dessous !

Jasper secouait sa tête avec emphase puis il m’entraîna avec Emmett jusqu’à un endroit invisible depuis l’estrade.

- Bella, quand on te dit qu’il n’y a personne dans sa vie, c’est vrai !

- Dans ce cas, explique-moi pourquoi je les ai trouvés étroitement enlacés et les ai vus s’embrasser !

Emmett me prit dans ses bras et me berça sur place alors que quelques larmes roulaient sur mes joues.

- Aaaah Bella… Vous êtes aussi butés l’un que l’autre… Quel gâchis ! Mon frangin ne s’est pas remis avec Jess ! Elle venait simplement le féliciter et lui demander une interview. Elle ne se remettra jamais avec lui puisque Newton et elle vont se marier…

- Quoi ?

- Newton t’a pas appelée ? Putain il est grave, c’est ton ex, bordel, tu méritais de l’apprendre de sa part !

- J… Euh… Mike a appelé plusieurs fois ce mois-ci et laissé des messages, mais je ne répondais pas et les effaçais automatiquement avant de les écouter… J-je croyais qu’il s’était fait plaquer par Jessica et que… enfin bref.

Bon sang, mais qu’est-ce que j’ai pu être conne !
Tu l’as dit, bouffie !

Jessica va se marier avec Mike, c’est génial !
Je me figeais en laissant ces paroles m’imprégner… Mais quelle connerie ! J’avais laissé mes insécurités et mes incertitudes me bouffer une fois de plus et m’étais moi-même mis des œillères sur la vérité. Quel temps perdu !

- Emmett, je veux bien admettre que j’ai fait une connerie en me laissant aveugler par ce que je croyais être la vérité, mais… Pourquoi Edward n’est pas venu me rejoindre dans ma loge après le ballet ?

C’était la première fois en un mois que je prononçais son prénom… Qu’est-ce que cela me faisait du bien !

- Ben… D’après ce qu’il nous a dit et ce que tu nous as raconté, il semblerait qu’il t’ait trouvée dans les bras de Jack… Et tout comme toi, il s’est fait des idées !

- Mais pourquoi ne lui avez-vous rien dit ?

Jasper posa ses deux mains sur mes épaules et se pencha pour me regarder droit dans les yeux.

- Crois-moi Bells, on lui a dit et redit, mais… Edward n’a rien entendu…

- Comment ça ?

Il échangea un regard lourd de sous-entendus avec Emmett et celui-ci hocha lourdement la tête avant de prendre la parole d’une voix triste et lasse.

- Tu te rappelles le nombre de fois où je t’ai dit que tu le rendais malheureux ? Je m’en veux d’ailleurs de t’avoir dit ça, mais… c’est vrai quelque part… ça fait 4 mois qu’il n’est plus le même…

- Je ne comprends pas…

- Bells, tu te souviens de l’état dans lequel vous étiez ce soir-là ?

- Tu parles que je m’en rappelle, Jazz ! J’ai jamais eu aussi mal au crâne de toute ma vie !

- Et bien… Ed n’en a pas décollé depuis tout ce temps…

- C’est à dire ? Jazz, sois plus clair !

- Ben… Disons qu’il picole tellement qu’il n’a même pas le temps de cuver, et à part boire et jouer du piano, il ne fait rien. C’est pire encore depuis son concert… Nous avons beau essayer de lui parler, c’est à peine s’il nous comprend… Il est sur sa petite planète à longueur de temps et on a beau essayer, on arrive pas à le faire atterrir… Je ne vais pas te mentir, Bella, mais… il est devenu une vraie loque…

Je les observais tour à tour et vis sur leurs deux visages la même expression de tristesse et d’inquiétude, bien qu’elle soit plus prononcée chez Emmett. Je me tournais alors vers les filles et les vis regarder en direction de l’estrade. Leurs visages reflétaient les mêmes sentiments que ceux de Jasper et Emmett. Je n’arrivais pas à croire ce qu’ils me disaient sur Edward, c’était impossible… Je devais absolument le voir. Je me levais et partis dans l’arrière-salle puis m’installais à une table tout au fond, la plus éloignée de l’estrade. Emmett et Rosalie me rejoignirent peu après.
De là où je me tenais, je pouvais observer Edward de tout mon saoul. Il jouait, les yeux fermés, le visage à la fois tendu par la concentration mais aussi rêveur. Ses épaules étaient voûtées, comme s’il portait toute la misère du monde. Il avait perdu quelques kilos comme le confirmaient ses joues excessivement creusées et son bracelet-montre trop large pour son poignet. Un faible sourire étirait ses lèvres, illuminant son visage d’une pâleur cadavérique tandis qu’il jouait, contrastant incroyablement avec toute la souffrance qu’exhalait son corps. Mon cœur se tordit dans ma poitrine lorsque je vis à quel point son mal-être était évident et si semblable au mien. Je me laissais bercer par la musique pendant ma contemplation de l’homme que j’aimais plus que tout au monde. La mélodie douce, tendre et sensuelle à la fois, me donnait l’impression qu’il m’appelait au travers des accords. Les notes se succédant me faisaient vibrer de l’intérieur, ses doigts volant sur le clavier me ramenaient à cette nuit, où ils courraient sur mon corps, réveillant toutes les sensations que j’avais cherchées à enfouir en moi il y a 4 mois. Puis la mélodie changea, le thème doux et relativement enjoué se métamorphosa en une tristesse poignante qui me fit souffrir au plus profond de mon âme et de mon être. Un grognement exaspéré s’échappa de ses lèvres et l’une de ses mains quitta le clavier pour s’emparer de quelque chose posé sur le banc. J’eus l’impression qu’on m’enfonçait une lame chauffée à blanc en plein cœur lorsque je le vis porter, d’une main secouée de tremblements, une bouteille d’alcool à ses lèvres et qu’il y bût à grands traits avant de la reposer sur le banc, près de lui. Edward ouvrit les yeux et se figea soudainement puis se tourna instantanément vers moi, comme attiré par une quelconque force magnétique. Mon cœur se brisa lorsque je croisais son regard, mort. Ses si belles prunelles émeraude n’étaient plus que deux disques verts, ternes et sans vie. Si je ne voyais pas son torse se soulever régulièrement au rythme de sa respiration, j’aurai pu croire avoir affaire à un cadavre tant il était pâle et son regard, tout comme son visage, absolument vide de toute expression. Cela me faisait si mal de le voir ainsi et j’aurai moins souffert si on m’avait arraché le cœur…
Son regard se vrilla brusquement au mien et une lueur l’éclaira soudainement, lui insufflant vie. Ses yeux prirent à nouveau cette splendide couleur émeraude, si particulière et son regard me transperça intensément, flamboyant de passion et j’eus l’impression de vivre à nouveau. Une immense vague de désir me submergea et je pouvais lire la même chose dans ses magnifiques émeraudes brûlantes d’envie. Ses doigts continuaient à voler sur le clavier, jouant un thème à la fois brutal et sensuel, sans jamais commettre la moindre fausse note alors que son regard était toujours ancré au mien. Il me détaillait, me scrutait, me buvait littéralement des yeux, se repaissant de me voir et inconsciemment, j’agissais de même. Seigneur, que je l’aimais !
Son souffle était court et je le voyais trembloter légèrement. Il prit plusieurs inspirations profondes pour se détendre, sans jamais me quitter des yeux. Il me donnait l’impression d’un coureur se préparant mentalement avant sa course, la visualisant afin de ne pas commettre la moindre erreur ; Edward se préparait à venir à ma rencontre. Un sourire timide commença à étirer ses lèvres avant de devenir totalement éblouissant, et au même moment, je sentis des bulles se déplacer dans mon ventre. Les bébés. Nos bébés se manifestaient, enfin. Sentaient-ils qu’ils allaient rencontrer leur père ? Oui, sûrement…
Enfin ! Il plaqua le dernier accord et s’apprêta à se lever lorsqu’il devint livide.

- Salut Bells !

- Hey ! Jake ! Comment vas-tu?

- Très bien, mieux que bien même ! Bells… Tu veux bien être la marraine du bébé ? On en a parlé avec Tanya et on veut absolument que ce soit toi… Je t’en prie, dis oui Bella !

J’étais totalement stupéfaite par sa demande. Jamais je n’aurai pu imaginer plus belle preuve d’amitié après ce par quoi nous étions passés tous les trois. Sans m’en apercevoir, j’avais plaqué mes deux mains contre ma bouche pour m’empêcher de sangloter et quelques larmes de joie coulaient sur mes joues. Je me levai et prit Jacob dans mes bras avant de m’exclamer

- Oui, Jacob ! Bien sûr que je te dis oui !

Je pouvais lister ce jour comme l’un des plus beaux de ma vie : j’allais enfin retrouver l’homme que j’aime plus que tout et allais être la marraine du bébé de ma meilleure amie.
Je me détachais de Jake, en sanglotant légèrement et vit Edward se diriger vers le côté bar, sans même un regard pour moi, le visage livide et empli d’une fureur contrôlée. Ses mâchoires étaient si crispées que j’ai cru qu’il allait se briser les molaires… Il bouscula une jeune femme blonde qui retournait s’asseoir avec ses amies et avant même que je ne le réalise, il la pressa contre lui et l’embrassa à pleine bouche. Si j’avais cru savoir ce que signifiait le mot « souffrir » ces derniers mois, j’avais été bien loin du compte. J’eus l’impression de ne plus pouvoir respirer, j’eus envie de vomir et mon cœur me fit atrocement souffrir en voyant l’homme de mes rêves embrasser une autre femme. Il lui chuchota quelques mots à l’oreille et elle lui répondit d’un petit hochement de tête, puis il l’entraîna à l’extérieur. Pas la peine d’être devin pour savoir qu’il l’emmenait chez lui…
Je restais clouée sur place, le corps tremblant, paralysée par la douleur. J’entendis mes amis discuter de je-ne-sais-quoi alors que ma vue se brouillait étrangement, des milliers de petites étoiles blanches passaient devant mes yeux avant qu’une espèce d’écran opaque m’empêche de voir clair. Ma tête bourdonnait et palpitait. De violentes nausées me prenaient. Mais tout cela n’était rien face à la peine de voir Ed… le voir avec une autre. Brusquement, une vague d’atroce douleur me submergea, principalement localisée au niveau du ventre et des reins et mes jambes n’arrivèrent plus à supporter mon poids. Oh non, tout mais pas ça… pas ça ! Pitié, laissez-les moi, ne me les enlevez pas… Je n’ai plus qu’eux… Je m’effondrais en hurlant, à moitié sonnée par la souffrance…

POV Tanya :

Enfin ! J’ai bien cru que la journée n’allait pas se terminer ! Six accouchements cet aprèm’, à croire que ces mamans s’étaient passé le mot !
Je suis pressée d’arriver au Twilight, j’espère que Bella va bien, elle m’inquiète… Je suis tellement heureuse de l’avoir retrouvée et d’avoir gagné à nouveau sa précieuse amitié ! De plus, grâce à elle, j’ai rencontré des personnes formidables, Alice, Jasper et Rosalie, et renoué avec un ancien ami que j’avais perdu de vue, Emmett. Il ne manque plus qu’Edward pour compléter ce tableau idyllique ! Il serait temps qu’il se réveille celui-là, et surtout qu’il arrête ses conneries. Emmett et Jasper m’ont expliqué ce qu’était devenue la routine quotidienne d’Eddy, je n’arrive tout simplement pas à y croire. Il a toujours eu une personnalité torturée, ce qui a énormément contribué à son talent, mais là, il dépasse les bornes ! Il va être papa, merde ! Faudrait qu’il se réveille !
Oooh… pourvu que Bella accepte la proposition de Jacob ! Je ne pourrais rêver meilleure marraine pour notre bébé ! En plus, nos enfants n’auront que quelques mois d’écart, ils pourront grandir ensemble !
Je suis enfin dans la rue du bar et… mais c’est Edward ! Qu’est-ce qu’il fait avec cette fille ? Pourvu que Bella ne l’ait pas vue avec, ça la détruirait…
Je gare ma voiture et au moment où j’entre dans le bar, j’entends un hurlement déchirant de souffrance et de douleur. Bella…

- Bells ! Bells nom de dieu ! Déconne pas, c’est pas drôle !

La voix paniquée de mon Jacob et les mines affolées d’Alice et Jasper me font courir. J’arrive dans l’arrière salle, Bella est clouée au sol, son corps à l’air de convulser. Seigneur non ! Elle a des contractions…

- Jasper ! Appelle tout de suite les urgences et passe-moi le téléphone dès que tu les as en ligne !

Je me jette à genoux à côté de ma petite Bella et pose une main sur son ventre. C’est bien ça, contractions. Non…

- Bella… Bella !

Elle peine à ouvrir les yeux, elle fait une grosse chute de tension…

- Jake ! Va chercher ma sacoche dans la voiture, viiiite !

Il ne se le fait pas dire deux fois et se précipite à l’extérieur.

- Rose, aide-moi, il faut lui enlever son jeans, tout de suite !

- Mais tu peux pas faire ça là ! Y’a du monde !

- On s’en fout ! Pas le temps de discuter, fais-le !

Alors que je déboutonne son jeans, la main faible de Bella s’agrippe à mon poignet. Elle est d’une blancheur cadavérique…

- Ta… nya… non…

- Bella… Tu as des contractions. Je dois absolument vérifier si ton col est ouvert… S’il te plait… Pense aux bébés, Bella !

Elle cligne faiblement des yeux et murmure un faible « oui ».

Jacob arrive avec ma trousse, je prends mon tensiomètre et mon stéthoscope pendant que Rosalie s’escrime à lui retirer son jeans. Je pose le brassard sur son bras et passe le pavillon dessous. Je pompe quelques instants… Oh non… 7,2… Je la reprends, les chiffres sont identiques… Merde ! J’enfile un gant chirurgical et m’aperçois que Jake, Emmett, Alice et Rosalie font écran pour cacher Bella à la vue des personnes présentes dans le bar. C’est dingue ça, à croire que l’espèce humaine aime se nourrir du malheur des autres… Ils sont tous à l’affut de ce qu’il se passe ! Bande de vautours…
Je palpe le col… Merde !
Jasper me tend le téléphone…

- … pouvez être plus précis, monsieur ?

- Je reprends la communication. Tanya Dénali, sage-femme au Seattle Hospital. J’ai une jeune femme de 25 ans, primipare et grossesse gémellaire, 16 S.A + 5 jours, 7.2 de tension, présentant des contractions avec ouverture du col de presque deux doigts.

- L’ambulance est déjà en route. Avez-vous quelque chose sur vous pour ralentir les contractions ?

- Non ! Rien…

- Ne vous inquiétez pas, l’ambulance ne va plus tarder.

- Merci, au revoir.

Et quelle connerie ! J’ai toujours des anti-spasmodiques sur moi, et comme par hasard, aujourd’hui, j’en ai aucun !
Alice et Rosalie caressent les cheveux de Bella en lui murmurant des paroles apaisantes tandis que Jacob et Emmett ont plutôt des envies de meurtres… Moi aussi d’ailleurs… S’il arrive quelque chose aux bébés, je lui ferais la peau à cet empaffé !
Un médecin urgentiste arrive à l’instant, suivi d’un infirmier tandis que Jasper et Alice font sortir les clients, mécontents de rater la suite du « spectacle ». Bande de connards !
Le médecin pose une voie centrale tandis que l’infirmier nous demande si Bella souffre d’une quelconque intolérance médicamenteuse. Non, pas de soucis de ce côté-là.

- Vous êtes sûre que la patiente en est à 16 semaines d’aménorrhée ? Elle est…

- Oui docteur, je la suis. Elle est bien à 16 semaines révolues…

Il lui injecte un antispasmodique pour stopper les contractions ainsi qu’une forte dose de calmant. Le brancard arrive et avec une infinie précaution nous déplaçons Bella et l’installons sur le brancard.

- Qui est le papa ? Nous demande l’infirmier.

- Ils… n’ont… pas… de… père…

Seigneur, la voix de Bella est si faible ! Emmett l’a regarde avec un air à la fois résigné et décidé. Une contradiction à lui tout seul, ce mec !

- J’peux monter avec vous ? S’il vous plait, ce sont mes neveux qui sont là-dedans ! Implore Emmett en effleurant doucement le ventre de Bella.

Le médecin va refuser, c’est sûr… Tiens non ! Il faut dire aussi que Bella s’accroche au poignet d’Emmett comme s’il était sa bouée de sauvetage.
Nous regardons tous l’ambulance partir puis aidons Jasper et Alice à fermer le bar avant de rejoindre Bella à l’hôpital… Pourvu que tout se passe bien…

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